Histoire et Patrimoine
Peyruis, Poulit Païs, en ribo de Durenço,… Félibre Henri Bérard
Adossé à l’extrême sud-est de la montagne de Lure, dominé par le sommet de Tourdeaux (877 m), Peyruis, village typiquement provençal, bénéficie d’une position centrale dans le triangle urbain Manosque-Digne-Sisteron, au cœur du département des Alpes-de-Haute-Provence.
Blottie au pied de collines densément boisées, sur la rive droite de la Durance, c’est une terre de passage fréquentée et un carrefour important entre les rivages méditerranéens et les Alpes.
La localité est mentionnée sous le nom de Petrozium dès 1068. Située sur le tracé de l’antique via Domitia, axe économique et militaire reliant l’Espagne à l’Italie depuis le II e siècle av. J.-C., cette voie fut empruntée, outre par les légions romaines, par des colons, des pèlerins, des voyageurs, des marchands, les messagers…
Au sud de Peyruis, un bac appelé la barque du loup permettait de rejoindre la rive gauche de la Durance. Les droits de péage revenaient au seigneur du lieu.
En lien avec l’évolution des voies de communication, Peyruis s’est peu à peu étendu vers la plaine, se développant vers et autour de l’actuelle route départementale (D4096) Marseille-Grenoble, tel qu’on le voit aujourd’hui.
Quelques sites à découvrir...
Le château
Au Moyen Âge, le fief de Peyruis fut doté d’une maison-forte à l’origine du château féodal, dont ne subsiste aujourd’hui que le monumental donjon transformé en pigeonnier, des vestiges de tours et de remparts, formant des jardins en « banquets ». Devenu une maison de style Renaissance plus confortable (XVI e -XVII e ), il fut doté de fenêtres à meneaux, d’une chapelle jouxtant la salle de réception, d’une fontaine dans la basse-cour. Avant la Révolution, les Fortia de Pilles, résidant à Marseille, en avaient fait leur résidence de loisirs. Il fut pillé et en partie détruit pendant la période révolutionnaire, avant d’être vendu puis abandonné.
Le site offre un panorama exceptionnel sur les collines environnantes, le vieux village autour de son église, son extension dans la plaine. La vallée de la Durance expose la mosaïque formée par les vergers producteurs de fruits appréciés et les parcelles cultivées. La création de digues (fin du XIX e ) a permis de stabiliser et de protéger des caprices du fleuve près de 200 ha de terres fertiles.
L’église Saint-Nicolas
Elle présente des styles différents, la construction ayant évolué au fil du temps : le bas-côté Nord le plus ancien, de style roman, la nef centrale, le chœur gothique de forme polygonale, le clocher carré de style Renaissance, les peintures murales au goût du XIX e siècle. Des vitraux très colorés (XVI e - XIX e ) et de nombreux tableaux agrémentent le lieu qui abrite deux bustes reliquaires de saint Roch et saint Nicolas provenant de l’ancienne chapelle Saint-Pierre. Dans un pilier du bas- côté sud, une plaque de marbre recouvre le dépôt du cœur du Peyruisien André Maure, (1769-1842), expatrié à l’île Maurice et bienfaiteur de son village.
Le vieux village et ses fontaines
Huit fontaines charment le promeneur flânant le long des ruelles tortueuses du vieux village : de Parlatan, l’une des plus anciennes, située hors des remparts au Moyen Âge et reconstruite en 1815, à la plus récente, inaugurée sur la place Fauchier en 2018…
En face de la fontaine Parlatan, la très ancienne porte d’entrée festonnée du village médiéval est dite « Juiverie » en souvenir d’une communauté juive de commerçants (XIII e - XIV e). Au-dessus de la porte se situait « la maison commune », siège des réunions des consuls représentants des villageois auprès des seigneurs.
La place Vieille et la rue des Barricades
Au centre du vieux village, au milieu d’un dédale de ruelles pleines de charme, la place de la Fontaine, récemment rénovée, entoure la plus ancienne fontaine du village dite domitienne, du nom de la voie romaine qui passait par là.
La rue du Grand-Cabaret
On y aperçoit la façade Renaissance d’une maison bourgeoise avec ses fenêtres à meneaux.
Plus bas, l’ancienne auberge du Grand-Logis, ou Grand-Cabaret, ouvre sa grille d’entrée sur une vaste cour et donne accès aux écuries où chevaux et cavaliers pouvaient se reposer, non sans avoir acquitté les droits de péage avant d’entrer dans le village.
La chapelle des Pénitents, ou chapelle Saint-Roch, et son cimetière
Signalée dès l’an 1 000 sous le nom de chapelle Saint-Pierre, elle a été reconstruite en 1720 par la confrérie des Pénitents blancs pour invoquer Saint-Roch en le priant de protéger le village de la contagion de la grande peste venant de Marseille.
Elle a abrité trois céramiques remarquables, « les trois Moustiers de Peyruis », faïences réalisées et offertes par l’artiste Joseph Fauchier (1725-1750), cachées pendant la révolution, puis vendues en 1895 au musée de Sèvres où on peut toujours les admirer aujourd’hui.
Le Canal de Manosque
En arrière du cimetière jouxtant la chapelle, la portion du canal creusé au XIX e siècle pour irriguer le terroir présente des infrastructures remarquables : ponts, galeries souterraines, syphons.
Le Champ de Gau
La colline dominant le canal offre une promenade très agréable parmi les jardins en terrasses, avec leurs murs de soutènement, d’ou l’on peut admirer le vieux village et son château, la plaine de la Durance et au-delà. Ce site bénéficie d’une exposition optimale très appréciée en hiver pour son microclimat.
Avant la Révolution, ce terroir d’un seul tenant appartenait aux seigneurs de Peyruis qui avaient fait aménager des restanques pour soutenir les terres arables. Le morcellement a débuté au XVIII e siècle avec le percement de chemins d’accès aux différentes parcelles presque toutes dotées de bassins alimentés par de nombreuses sources.
En contrebas, la ferme du Crouton, ancien moulin à blé, a été construite sur le site d’un ancien domaine agricole romain, la villae Petrosio. De nombreux vestiges gallo-romains ont été trouvés lors du creusement du canal.
Personnalités liées à l’histoire de Peyruis
Joseph Fauchier (1687-1751)
Né à Peyruis, ce brillant faïencier a exercé son art à Marseille sous la maîtrise de Joseph Clerissy, de Moustiers, puis a fondé sa propre manufacture sans jamais oublier son village natal. Il est l’auteur des trois chefs-d’œuvre, un saint Roch, un bénitier et un Christ en croix réalisés en technique « grand-feu polychrome », sans doute innovante à Marseille.
André Maure (1769-1842)
Ce jeune Peyruisien de 20 ans, qui décide de partir à l’île Maurice, devient commerçant, agent de change, journaliste, militant pour l’abolition de l’esclavage, écrivain de Souvenirs d’un vieux colon de Maurice ; il y parle de révolution, de Napoléon, du passage de l’île sous gouvernement anglais. Il n’a jamais oublié son village natal et son cœur repose dans l’église Saint-Nicolas.
Henri Bérard (1869-1953)
Peyruis compte également un personnage pittoresque en la personne du félibre Henri Bérard, conteur merveilleux, poète populaire de langue provençale qui assura, durant soixante ans, les fonctions de « rampelaïre » (en provençal celui qui bat le rappel), c’est-à-dire tambour-crieur public-allumeur de réverbères.
À proximité
Direction nord : à 2 km, route de Lure via Mallefougasse (RD101), la chapelle Saint-Donat est l’un des plus anciens édifices médiévaux de la Haute-Provence, témoin du premier art roman.
Direction sud : à 4 km, dominant la vallée de la Durance, l’Abbaye Notre-Dame de Ganagobie abrite une mosaïque unique en France par sa dimension et sa qualité artistique (1124), chef-d’œuvre de l’art roman. Sans oublier, sur la route de Lurs-Ganagobie, le pont romain qui y conduit…
Peyruis, village en pleine expansion qui compte 2 874 habitants au dernier recensement, est une terre d’accueil pour de nouvelles activités industrielles et commerciales, et sait aussi promouvoir les richesses de son terroir : ses fruits, son huile d’olive, son nougat, etc. Les zones artisanales de Saint-Pierre, Mardaric et la Cassine, situées à proximité de l’autoroute A51, sont le siège d’entreprises florissantes et offrent un potentiel d’installation attrayant.